La soupe démocratique au menu de France-Tibet

par André Lacroix, le 19 septembre 2019

En 2007, l’Assemblée générale des Nations unies a proclamé le 15 septembre « Journée internationale de la démocratie » dans le cadre d’une résolution visant à encourager les gouvernements à renforcer et consolider la démocratie.

Pour l’édition de cette année qui tombait un dimanche, Audrey Azoulay, Directrice générale de l’UNESCO, a déclaré : « (…) nous célébrons davantage qu’un principe d’organisation politique : nous célébrons une certaine idée de l’homme. La démocratie est en effet un idéal : un idéal de ‘dignité, d’égalité et de respect de la personne humaine’ (…) ». De son côté, António Guterres, Secrétaire général de l’ONU s’est engagé personnellement : « (…) j’exhorte tous les gouvernements à respecter le droit à une participation active, concrète et effective et je rends hommage à toutes celles et tous ceux qui œuvrent inlassablement en faveur de cette noble cause. »

 

 

 

Une noble cause détournée

Les adeptes du dalaï-lama n’ont pas manqué de s’inscrire à leur manière dans cette initiative onusienne, en lançant l’invitation suivante sur le site de France-Tibet (14/09/2019) :
« Bonjour à tous, Tashi Deleck! Retrouvez nous ce dimanche à 14h30 au Trocadero pour la journée internationale de la démocratie! »

Mais que signifie la démocratie pour ces gens-là ? Seraient-ils mus par un idéal « de dignité, d’égalité et de respect de la personne humaine » ou par l’envie de participer à une offensive occidentale antichinoise ? L’affichette France-Tibet (reproduite ci-dessous) vaut tous les discours. Comme dans certains restaurants, asiatiques et autres, dont les menus sont illustrés de photos, elle propose, en guise de plats, une demi-douzaine de drapeaux censés représenter leurs spécialités : une sélection de… « peuples opprimés ».

 

 

En bas, de gauche à droite, on repère sur cette « carte »:

  • le drapeau du Tibet (1),
  • le « drapeau national » du Viêt-Nam (1948-1975),
  • le drapeau de la Mongolie intérieure,
  • le drapeau du Royaume du Laos (1954-1975),
  • le drapeau des Ouïghours du Xinjiang,
  • le drapeau de Hong-Kong
  • l’encart « Démocrates chinois d’outre-mer » (le plat du jour ?).

Au fourneau : une certaine Mme Tran avec mention de son diplôme décerné par la « Fédération des Pays Asiatiques pour les Droits de l’Homme » (2).

 

Copains coquins

Cette carte « alléchante » a de quoi faire saliver les adeptes du « Free Tibet ». Même si, depuis les années 1980, le dalaï-lama plaide officiellement pour une simple « autonomie poussée » du Tibet au sein de la République populaire de Chine, nombre de ses adeptes à Dharamsala et ailleurs – dont il ne s’est jamais désolidarisé – continuent à revendiquer l’indépendance et, dans ce but, sont prêts à se joindre à toutes les causes susceptibles, croient-ils, de désintégrer la Chine.

Pour donner corps à leurs fantasmes, ils acceptent le parrainage des royaumes du Viêt-Nam et du Laos qui, comme d’autres Anciens Régimes dont celui du Tibet, ont été balayés par les forces anticolonialistes à forte participation communiste. Un tel apparentement, fondé sur un passé révolu, ne peut provoquer qu’un regard amusé.

Moins comique assurément, mais tout aussi coupé de la réalité, c’est l’alignement, en plus du Tibet, de points de friction actuels aux extrémités de la Chine, dont on espère qu’ils aboutiront à des sécessions :

  • la Mongolie intérieure : ce n’est pas pour de simples visites spirituelles que le dalaï-lama s’est, entre 1979 et 2014, rendu huit fois en République de Mongolie ;
  • le Xinjiang que les amis du dalaï-lama se plaisent à appeler le Turkestan oriental, feignant d’oublier que ce vaste territoire, travaillé aujourd’hui par un islamisme radical recourant parfois aux attentats terroristes, fait partie intégrante de la Chine depuis le 18e siècle ;
  • Hong Kong dont les Occidentaux, grands amis du dalaï-lama, refusent d’admettre que c’est une terre chinoise, qu’ils verraient d’un bon œil redevenir une colonie britannique.

 

On imagine sans peine le tsunami de protestations qui déferlerait sur les rivages occidentaux si d’aventure était organisée à Pékin une manifestation en faveur des indépendantistes de Catalogne, du Pays basque, de Corse, de Padanie ou de Cascadie (liste non exhaustive)...

 

Des rêves sans lendemain

Sans doute s’est-il trouvé, Place du Trocadéro, des gens pensant, en toute bonne foi, manifester pour défendre la démocratie et pour exprimer la « Voix des Peuples Opprimés ». En fait, il s’agissait essentiellement d’une manifestation antichinoise. Dans certaines sphères, on rêve tout haut (voir la carte ci-dessous) de faire perdre à la Chine la moitié de son territoire, un peu comme au 19e siècle, quand la Chine a été dépecée au profit de l’Occident.

resistanceinventerre.wordpress
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Mais, n’en déplaise aux nostalgiques, nous ne sommes plus au 19e siècle, ni au 20e. La Chine est redevenue une grande Puissance, parfaitement capable de faire respecter son intégrité territoriale : la Région autonome du Tibet, la Région autonome ouïghoure du Xinjiang, la Région autonome de Mongolie intérieure, la Région administrative spéciale de Hong Kong font partie et continueront à faire partie de la République populaire de Chine.

 

Les rêves séparatistes de France-Tibet et consorts ne sont que des fantasmes. Des gouttes d’eau qui coulent sur un canard … laqué.

 

(1) Lire à ce sujet http://tibetdoc.org/index.php/politique/exil-et-dalai-lama/200-hisser-le-drapeau-tibetain-non-merci.

(2) Mme Tran Nghi est une Française d’origine vietnamienne, que son anticommunisme a jetée dans le bras de l’Oncle Sam. À l’occasion d’une manifestation organisée à Paris le 10 décembre 2016 pour « défendre

les droits de l’Homme en Asie », elle a reçu les honneurs de The Epoch Times (https://fr-mb.theepochtimes.com/defendre-droits-de-lhomme-asie-defi-communautes-21182.html),cette entreprise médiatique internationale qui soutient les politiciens les plus à droite (y compris Trump) aux États-Unis et dans le monde et qui, malgré ses démentis, entretient des relations étroites avec… Falun Gong, la secte interdite en Chine.