Standing ovation du parlement européen pour le dalaï-lama : mérité ?
par Jean-Paul Desimpelaere, le 30 juin 2009
Le 4 avril 2008, le dalaï-lama était l’invité du parlement européen. Son discours est dans la même lignée que bon nombre de ses discours récents. Il commence avec : « Je suis ici surtout pour promouvoir des valeurs humanistes, telles que les rapports chaleureux entre les gens. » Voilà qui se dit en une seule phrase... suivie d’un discours politique d’une heure sur la « question tibétaine ». Là aussi les grandes lignes sont les mêmes depuis des années. Pourtant, il est utile de mettre en évidence quelques nouveaux points.
Tout d'abord, il décrit les émeutes du mois de mars à Lhassa comme étant des actes de bravoure spontanés. Nous savons toutefois, par des touristes présents sur place à cette période, qu’il s’agissait d’actes incendiaires et de lynchages.
Du coup, le saint homme exige de la Chine qu’une « équipe d’inspection » internationale soit admise au Tibet. Les États-Unis émettent également cette exigence.
« Les Tibétains vivent dans une angoisse permanente », dit-il, « ils se demandent si la prochaine arrestation sera pour moi ». Voilà comment le dalaï-lama se fait la voix de la population tibétaine ; c’est ce qui m’irrite le plus, car les Tibétains vivant en Chine sont loin de s'angoisser pour cela.
J’étais au Tibet en octobre 2008. J’ai pu parler librement avec des citadins, des intellectuels, des paysans : ils considéraient les émeutes comme nocives pour le Tibet, « on sera mieux si cela ne se reproduit plus », disaient-ils. La ville de Lhassa vivait comme d'habitude sillonnée par les commerçants, les pèlerins et les touristes. La tension à laquelle le dalaï-lama fait allusion n’était absolument pas présente.
« Dans notre Memorandum au gouvernement chinois, nous disons clairement que nous ne voulons pas chasser les non-tibétains hors du Tibet. Par contre, nous voulons freiner l’implantation en masse de Chinois han dans certaines régions, car cette immigration place les Tibétains en position minoritaire et menace l’équilibre écologique. »
Les références à d’autres minorités ethniques de Chine, principalement celles vivant dans les régions entourant le Bassin central, sont de plus en plus fréquentes dans ses discours. D'après lui, ces ethnies pourraient également revendiquer leur indépendante tôt ou tard, si l’on comprend bien ses allusions. Le 14ème dalaï-lama fait principalement référence au Turkestan oriental (le Xinjiang), à la Mongolie Intérieure et à la Mandchourie.
À cela il ajoute qu’en Mongolie Intérieure, la population autochtone est remplacée, à 80%, par des Chinois han. Devraient-ils aussi partir de là, alors que ces quelques 18 millions de personnes vivent là depuis plusieurs siècles ?
Il continue ainsi : « Ma confiance aux dirigeants chinois est de plus en plus faible. Par contre, il y a de plus en plus de mouvements d’intellectuels chinois qui me soutiennent. » En effet, le Tibet tel que le 14ème dalaï-lama le rêve ne sera jamais indépendant si, à l’intérieur même de la Chine, il ne s’opère pas une sorte de « Révolution Orange ». Donc, il ne parle pas uniquement du Tibet, mais aussi de la Chine elle-même.
Par exemple, il a félicité le parlement européen pour l’attribution du prix Sakharov à un dissident chinois.
Et de conclure : « J’espère le meilleur, mais je me prépare au pire. » Apparemment, dans sa conception, l'avenir ne sera pas toujours pacifique.
Que ce discours fut salué par une « standing ovation » du parlement européen dépasse mon entendement.
L’Europe applaudit de la pure fiction politique, de la propagande. C’est dangereux.