Une famille du Qinghai : 4 fils, 3 filles et 800 moutons

par Jean-Paul Desimpelaere, le 27 janvier 2009

Golmud est une petite ville située à presque 3000 m d’altitude dans la province du Qinghai et est le point de départ de la nouvelle ligne ferroviaire vers Lhassa. Il n’y pleut presque jamais : ce qui tombe là-bas pendant un an, correspond à ce qui tombe chez nous pendant un mois humide. Un père d'une famille  de 7 enfants ( 4 fils et 3 filles) m’a accueilli pour bavarder un peu. C'était en septembre 2007. Il me raconte fièrement qu'il possède 2 hectares de terrain qui sont irrigués par l’eau de très lointains glaciers, il y cultive du blé et des légumes. Il élève aussi 800 moutons.


Deux de ses 4 fils montent avec femmes et enfants dans les montagnes arides pendant la courte période d’été, à 150 km en direction du Sud, pour faire paître le troupeau. Lui-même a 75 ans et est aussi ridé que les collines montagneuses et sablonneuses qui l'environnent. Ses trois filles sont mariées et vivent ailleurs à Golmud.

Un autre de ses fils travaille au chemin de fer comme aiguilleur. Un quatrième fils l'aide à la récolte. Quelques serres fournissent une des légumes variés. La famille se nourrit toute l’année de leurs propres récoltes et gagne environ 2500 euros en plus par an grâce à la vente des surplus. Cela ne semble pas beaucoup, mais en Chine les agriculteurs s’en sortent en moyenne avec un peu moins. Les Tibétains ne sont pas lésés.


La famille habite depuis 1980 dans l’oasis agricole de Golmud, mais elle est originaire de la région qui entoure le monastère de Ta’ersi, dans l’Est du Qinghai, la région natale du dalaï-lama. A Golmud, ils disposent de plus de terres. Pour une famille chinoise, 2 ha, c’est beaucoup, la moyenne étant de moins d’1/4 d’ha.

Le déménagement a du être payant pour cette famille car en 2000, elle a pu construire une nouvelle maison. Dans son salon bien meublé est accrochée une gigantesque photo panoramique du Lhassa moderne. Et au-dessus de la porte de la chambre à coucher, un diplôme, avec ces mots : « Il a réussi à se sortir seul de la pauvreté à la force de ses poignets ».

Sa
Sa "petite terrasse" derrière la maison

Auparavant il était travailleur saisonnier. Il était déjà venu avant 89 dans la région de Golmud pour y garder les moutons d'autres éleveurs et pour aider aux semailles et à la récolte. Il a alors appris les techniques agricoles sur le tas et est venu s’établir à son compte à Golmud avec sa famille. Aujourd’hui, dans son intérieur agréable,  il possède un réfrigérateur, un jeu vidéo, et d'autres modernités. De plus, il a pu s'acheter un tracteur.

C’est un homme heureux, dit-il, «  parce que sa femme vit encore et que sa « grande famille » est composée de 17 personnes au total ». Lorsqu’il sera à la retraite (l'âge dépend de lui), il pourra prendre le train pour se rendre à Lhassa avec sa femme pour le plaisir, et pour rendre hommage à Bouddha.

le fermier, mon ami tibétain et interprète, un copain chinois et un voisin
le fermier, mon ami tibétain et interprète, un copain chinois et un voisin