Les Tu et les Tibétains célèbrent ensemble un culte animiste

par Jean-Paul Desimpelaere, le 15 février 2011

Les Tu sont une ancienne peuplade qui, avant l’arrivée des Tibétains au 8ème siècle, vivaient dans la province du Qinghai. Au nord-est de cette province, certaines régions sont encore habitées par les Tu. Au fil du temps, les deux ethnies se sont mélangées et assimilées. Pourtant, dans la région de Regong-Tongren (ou Repgong-Tunrin, il s'agit du même endroit, mais en dialectes différents), un festival animiste imprégné des traditions Tu, donc non bouddhiste, a lieu tout les ans. Nous y étions en 2009, accompagnés de quelques photographes professionnels Japonais et Hongkongais.


Sur une petite place devant le temple du village, tout au long de la journée, les villageois dansent en cercle sous un soleil de plomb, accompagnés de tambourins. Ils dansent autour d’un bûcher sur lequel de la nourriture onéreuse est brûlée et des litres d’alcool sont versés. Il y a très longtemps, c'était des moutons qui étaient sacrifiés. Aujourd’hui, les villageois apportent encore beaucoup de viande, mais les fruits exotiques semblent prendre le dessus, ainsi que l’alcool fort.
 

Ce ne sont pas des fruits en plastique ! (photo JPDes. 2009)
Ce ne sont pas des fruits en plastique ! (photo JPDes. 2009)

Chaque village Tu a sa divinité et, comme partout ailleurs, elle doit être apaisée, surtout avant l’arrivée des récoltes. Le dieu du village est en effet un dieu horrible qui symbolise tous les dangers menaçant la survie de la communauté. Cette célébration se déroule donc juste avant les récoltes, durant le mois de juillet.
Il ne s'agit pas d'une célébration des moines bouddhistes du monastère voisin. Soit dit en passant, le plus ancien monastère du Qinghai se trouve justement à Tongren. Il date du 13ème siècle et est de l’école Sakya, antérieure à celle de la lignée des dalaï-lamas (Gelukpa).


Cette célébration est animiste, donc pré-bouddhiste, et répond aux croyances populaires des Tu. Il n'empêche que les traditions Tu et bouddhistes se sont mêlées au fil des siècles. C'est pourquoi c'est au chef du monastère bouddhiste que revient le choix du « possédé potentiel » : parmi les candidats masculins du village, il élit un homme puissant qui saura tenir une transe pendant quelques heures.

   

autour du bûcher dans la cour du temple  (photo JPDes. 2009)
autour du bûcher dans la cour du temple (photo JPDes. 2009)

La petite cour intérieure du temple du village sert de lieu de culte. L’homme élu, accompagné par une garde protectrice, entre en transe par une technique d’hyperventilation ce qui, à plus de 2000 m d'altitude, peut provoquer une certaine excitation. La divinité locale vient habiter le corps de l'élu pendant plusieurs heures, et reçoit ainsi les offrandes des villageois.
Assez spectaculaire !

 

le chamane en transe
le chamane en transe
il se ventile !  (photo JPDes. 2009)
il se ventile ! (photo JPDes. 2009)