Qinghai-Tibet : des gens près du chemin de fer
par Jean-Paul Desimpelaere, le 24 décembre 2012
En 2006, une liaison ferroviaire entre Golmud et Lhassa a été construite. Le Tibet n'était plus la seule région administrative de la Chine qui n’était pas encore rattachée au réseau ferroviaire.
Le chemin de fer est une véritable prouesse technique. La longueur totale de la nouvelle liaison Golmud-Lhassa est de 1142 km, dont près de 1000 km se situent à plus de 4000 mètres d'altitude et dont 70 km se trouvent au dessus de 5000 mètres.
En 2007, j'ai eu l'occasion d'interviewer un grand nombre de familles tibétaines qui habitaient dans la région de passage du train, ou qui sont venues y habiter car la ligne de chemin de fer représentait pour elles un espoir d'amélioration de vie. Mon enquête s'est déroulée sur les premiers 500 km du chemin de fer entre Golmud et Lhassa, dans la province du Qinghai, principalement.
Pour les endroits où le chemin de fer passe sur un sol de glace, des techniques spéciales ont été mises en place pour garder le sol froid durant les brefs étés, afin que le sol ne devienne pas glissant.
Trop peu de bergers en difficulté en raison de la sécheresse croissante qui menace le Haut plateau ont bénéficier d'une formation technique. Ils sont embauchés pour entretenir la voie de chemin de fer aux côtés d'ouvriers venus de la ville de Golmud.
Certains bergers ont été délocalisés en raison de la sécheresse qui sévit sur le Haut plateau. Ils sont installés dans de nouveaux villages construits en plein désert et à peine achevés. Leur problème majeur est le manque d'emploi, bien qu’une allocation de survie leur est octroyée. Les travaux d’entretien de la voie ferrée ne sont pas suffisant, car ils ne couvrent que quelques semaines par an.
En Chine, chaque village élit son chef. Dans ce nouveau village pour bergers délocalisés, le chef a dû vendre tout son troupeau de yacks (80 têtes) et de moutons (700), en 2004. Il se tourne les pouces ici, car il n’a plus de travail régulier. Il a reçu la maison gratuitement et perçoit 500 yuan par mois comme allocation de survie. Pour sa fonction de « chef du village », il perçoit 170 yuan par mois. Auparavant, avec son troupeau, il gagnait 2500 yuan par mois. Une chose pour laquelle il est content : les écoles ne sont pas trop loin. Dans sa région d’origine, les distances étaient énormes et de ce fait, la scolarité était très basse. Avec l’argent de la vente de son troupeau, il saura garantir des études supérieures à ses quatre enfants (2 filles et deux fils). L’aîné a 23 ans, le plus jeune 13 ans. Il espère que les autorités locales, qui l’ont incité à se délocaliser, vont mettre tout en œuvre pour que ses enfants trouvent un travail après leurs études.