Manger du poisson au Tibet

par Jean-Paul Desimpelaere, le 25 octobre 2008

Les tibétains consomment peu ou pas de poisson, surtout les personnes plus âgées, car « il y a quelque chose de sacré dans le poisson, nous ne pouvons pas le manger », disent-elles.


Lorsque l’Armée Rouge arriva au Tibet en 1951, les soldats avaient reçu l'ordre strict de « ne pas pêcher ni vendre du poisson », par respect pour les coutumes locales. En effet, les cadavres des Tibétains sont souvent confiés aux rivières (pour les plus pauvres) ou aux cieux (pour les plus riches), donc indirectement aux poissons ou aux vautours qui dès lors sont considérés comme les libérateurs des esprits qui animent les corps.

Cela n’empêchait pas la noblesse tibétaine - moines de haut-rang inclus - de déguster le poisson dans l'ancien Tibet. Alexandra David-Neil en témoigne en décrivant un repas somptueux avec le moine intendant de l’abbé du grand monastère Labrang. [1]


Beaucoup de poissons pêchés actuellement dans les lacs et les rivières du Tibet sont exportés vers les provinces chinoises voisines. Des pêcheurs tibétains pêchent encore à la manière traditionnelle en utilisant des radeaux fabriqués avec des peaux de yacks cousues ensemble pour descendre les rivières.

Mais depuis peu les pêcheurs des grands lacs sont souvent des Han et la quantité de poissons a fortement diminué. A haute altitude les poissons ne grandissent pas vite, pêcher de la même manière qu’ailleurs en Chine s'avère néfaste au bout du compte.

De plus, il n’existe pas encore de limitation légale à la pêche, le seul frein étant les prix qui grimpent. Pour la jeune génération tibétaine, le poisson est devenu un produit de luxe.


Notes
[1] "Au pays des brigands gentilshommes", pag 65-79, Editions Plon pocket, Paris, 1980. Intéressant à relire pour se (re)rendre compte de la richesse de certains moines : vaisselle en or et argent, peaux de léopards sur les divans, raisins de Grèce, oeuvres d’art dans la maison et un cuisinier... Chinois !