Carré – Arte : Non à la censure

par André Lacroix, le 17 septembre 2025

Le réalisateur expérimenté Jean-Michel Carré a réalisé un documentaire intitulé Tibet, un autre regard, fruit de nombreuses enquêtes sur place et de contacts multiples avec des connaisseurs. Mais ce remarquable travail journalistique n’a pas plu à certain(e)s universitaires sinophobes qui l’ont jugé « antiaméricain » et « prochinois » ; cette horde de censeur(e)s malveillant(e)s) a réussi à imposer à Arte la déprogrammation de l’émission à laquelle elle s’était engagée (relire : https://www.legrandsoir.info/arte-une-chaine-enchainee-a-la-sinophobie.html)


Mais l’affaire n’est pas close. La justice va devoir se prononcer sur cette censure inacceptable. Et la presse va devoir en informer l’opinion, comme a déjà commencé à le faire « Le Monde diplomatique » sous la plume de Renaud Lambert : https://mondediplomatique.fr/2025/04/LAMBERT/68280.

 

Entre-temps, le documentaire continue son petit bonhomme de chemin.

 

Prochaine diffusion publique : 

le 23 septembre 2025 à 19h30

à la libraire TROPIQUES,

63, Rue Raymond Losserand 75014 Paris

 

ARTE, un nouveau censeur culturel ? 

RENCONTRE DÉBAT, DÉDICACE avec Jean-Michel Carré

Mardi 23 septembre à partir de 19h30 

https://www.librairie-tropiques.fr/2025/09/pinpin-au-tibet.html 

 

Jean-Michel Carré

 


  

Lettre de Jean-Michel Carré

 

Je dis bien : « Arte censure » et non pas « Arte censurée ».

Beaucoup de professionnels mais aussi des spectateurs réguliers ne peuvent imaginer que Arte, chaîne respectée et respectable, pourrait un jour censurer totalement un film. Et ce, jusqu’à demander d’ôter les mentions Arte dans les génériques de début et fin. Cela vient pourtant d’arriver à mon dernier film « Tibet, un autre regard ». Un sujet certes sensible mais qui demandait d’autant plus d’être abordé de manière indépendante et critique. Ce qui était dès le départ le dossier accepté par Arte et qui se retrouve dans la version finale du film. Elle l’a coproduit puis accepté le montage définitif ainsi que le PAD (Prêt à diffuser). Une Première depuis l’existence d’Arte !

Cela a duré six années depuis la signature du contrat. Un temps infini durant lequel le montage est devenu peu à peu un bras de fer permanent dès lors que le film final ressemblait paradoxalement de plus en plus au projet initial accepté ! La réalité du terrain et la découverte d’archives inédites incontestables allaient pouvoir enfin être mis à la disposition du public. Des faits documentés qui remettaient en cause l’histoire du Tibet longtemps mythifiée par quelques zélotes du monde universitaire. Ce n’était plus une analyse intellectuelle sur papier mais une mise à plat d’une réalité dérangeante et malvenue en ces temps actuels de pensée atlantiste dominante de l’Occident collectif.

 

Le film qu'Arte ne veut pas que vous voyez

L’histoire n’est pas une science exacte, elle évolue suite à la découverte régulière d’archives. Ici, le système est aggravé du fait que même ces archives provenant de faits élaborés par des pro-exilés tibétains eux-mêmes – film de la CIA ou interviews du Dalaï Lama - puissent être niées où même totalement ignorées ou cachées !

Ce sont des « universitaires » qui se sont empressés de crier au scandale, à la calomnie, à la diffamation en écrivant à la présidence d’Arte pour demander à la chaîne de ne pas diffuser ce documentaire sous prétexte qu’il serait « prochinois », alors qu’il ne montrait que la complexité d’un conflit géopolitique, non pas entre le Tibet et la Chine mais entre la Chine et les États-Unis ! Et la chaîne signe servilement ! Ils auraient pu, comme cela est arrivé il y a quelques années, mettre un bandeau indiquant qu’ils se désolidarisaient de ma vision d’auteur, et prévoir un débat contradictoire à la suite de la diffusion. Que nenni, il ne fallait absolument pas que des citoyens découvrent des images déconstruisant la bonne pensée occidentale…

Face à cette censure de la liberté d’expression et de création, je me trouve aujourd’hui dans la nécessité d’assigner Arte en justice. Car au-delà de l’impossibilité de porter un regard sur une histoire méconnue, elle signifie aussi pour moi l’impossibilité de pouvoir dès lors travailler avec le service public en France mais aussi dans une grande partie de l’Europe. Sans oublier de multiples conséquences pour ma société.

Il ne s’agit pas d’être pro-chinois ou pro-tibétain, mais se soucier des faits historiques même s’ils doivent remettre en question une doxa qui refuse depuis des décennies de reconnaitre la complexité du récit. Il s’agit de conflits réels continuellement occultés qui n’empêcheront personne d’avoir sa propre opinion mais cette fois en connaissance de cause et aussi sur d’autres terrains que la Chine.

Milan Kundera m’avait dit un jour : « Le cinéma doit rester un espace médiatique alternatif aux médias dominants. Un espace qui permet la discussion, la nuance et d’apporter des compléments d’information. » 

À nous de continuer de faire respecter cet espace, surtout sur une chaîne publique qui se dit être un lieu de liberté d’expression.

Jean-Michel Carré