Les habitants du plus haut canton de Chine déménagent
par Jan Jonckheere de Chinasquare, le 23 juillet 2022
Le canton tibétain de Tsonyi est le plus haut canton de Chine puisqu'il est situé à plus de 5000 mètres d'altitude. La semaine dernière, un deuxième groupe de résidents a été déplacé du canton invivable vers Singpori, près de Lhassa, et d'ici la fin août, tous les résidents du canton auront été déplacés. L'objectif est à la fois d'offrir de meilleures conditions de vie aux résidents et de soulager la réserve naturelle de Changtang.
Le canton tibétain de Tsonyi couvre 120 000 km² et est situé à 800 km au nord-ouest de la capitale régionale, Lhasa. La zone fait partie de la réserve naturelle nationale de Changtang, la plus grande et la plus haute réserve naturelle de Chine. En raison de sa haute altitude et de son environnement difficile, la région n'est pas vraiment adaptée à l'habitation humaine. L'oxygène de l'air ne représente que 40 % de celui de la plaine. L'hiver dure 10 mois par an et les températures les plus basses atteignent moins 40 degrés Celsius. De nombreux résidents développent des maladies cardiaques et pulmonaires et de l'arthrite dès leur plus jeune âge.Le gouvernement a décidé de reloger les résidents en 2019. Cette initiative vise à la fois à offrir un meilleur cadre de vie aux résidents et à protéger la réserve. Les habitants de 3 municipalités (townships) ont déjà déménagé en 2019 à Singpori qui est situé sur la rive nord de la rivière Yarlung Zangbo dans la ville de Shannan à une altitude de 3 600 mètres. L'aéroport de Lhassa se trouve à 10 km.La semaine dernière, le relogement du deuxième groupe de résidents a commencé. Quatre autres communes déménageront au début du mois d'août, de sorte que les sept communes du canton seront complètement relogées d'ici là. Mardi, 300 habitants ont quitté leur commune de Doima pour se rendre à Singpori, à 1 000 km au sud.
Pour Garma, 70 ans, qui est née et a grandi dans la région, la décision n'a pas été facile à prendre, bien qu'elle souffre également d'arthrite. Finalement, Garma pense que la relocalisation est une bonne chose, il lui sera plus facile de se rendre plus fréquemment dans les monastères de Lhassa et de Shannan pour vénérer Bouddha. Ce déménagement lui permettra aussi de se rendre plus facilement à l'hôpital et d'aider ses enfants à ne pas contracter les maladies du plateau. En compensation de leur sacrifice, les cinq membres de la famille de Garma, y compris son arrière-petit-fils de deux ans, recevront une subvention de 7 500 yuans par personne et par an. À Singpori, la famille de Garma a reçu une maison à deux étages et un petit appartement, équipés de toilettes et de cuisinières à gaz. La commune dispose également d'un hôpital récemment construit, d'un jardin d'enfants, d'une école, d'un marché et d'un centre de loisirs.L'administration a établi une période de transition pour les années à venir afin que certains jeunes puissent se relayer pour garder les troupeaux dans leur canton de Tsonyi par le biais d'une coopérative établie dans chaque village. Les résidents relogés peuvent détenir des parts dans les coopératives avec leurs pâturages et leur bétail comme investissements et gagner des dividendes. À la fin de la période de transition, les jeunes viendront également dans leurs nouvelles maisons et rendront les vastes terres à la nature. "Lorsque mes enfants retourneront au troupeau, je pourrais aussi les accompagner pour voir la ferme et les moutons", dit Garma. Sa petite-fille de 22 ans, Sichod Tsomo, a du mal à taper les caractères tibétains sur son smartphone parce qu'elle n'a pas été longtemps à l'école. Son fils est plus chanceux, il peut aller gratuitement à l'école maternelle de Singpori. A l'exemple de son mari qui a trouvé du travail après une formation professionnelle, Sichod Tsomo envisage de suivre un parcours similaire.
Selon le secrétaire du parti de Tsonyi, Yang Wensheng, certains des résidents relogés ont trouvé des emplois de cuisiniers et d'opérateurs de machines après une formation professionnelle, tandis que d'autres sont allés travailler dans des villes comme Lhassa et Shannan. Cette mesure a permis de porter le revenu disponible par habitant de la région à près de 13 600 yuans en 2021, soit près de 30 % de plus qu'en 2019, année où la région est sortie de la pauvreté....Les zones naturelles protégées couvrent près de 40 % de la superficie du Tibet. La population d'animaux sauvages rares a augmenté. Selon le département régional de l'écologie et de l'environnement, la population d'antilopes tibétaines dépassant les 300 000 têtes, celle de yacks sauvages les 20 000 et celle de grues à cou noir les 10 000 têtes. En raison de l'augmentation des populations d'animaux sauvages dans la réserve naturelle nationale de Changtang, le problème de la concurrence entre les humains et les animaux sauvages pour l'habitat est devenu plus important. "Notre bétail est souvent attaqué par des ours, des loups et même des léopards des neiges", a déclaré Garma. Selon la norme locale d'indemnisation, les bergers sont indemnisés à hauteur de 500 yuans pour un mouton tué par des animaux sauvages et de 5 000 yuans pour un yack.
Source: Peoples Daily
