Histoire du Tibet, en bref
par Jean-Paul Desimpelaere, le 23 décembre 2011
Ci-dessous un résumé succinct retraçant les faits marquants de l'Histoire du Tibet depuis la dynastie des Tubo, ou dynastie du Yarlung, au 7ème siècle après J.-C., jusqu'au 20ème siècle.
A partir de 640 de notre ère s’est formé, sur le Haut plateau asiatique, un grand royaume dominé par les Tibétains : le royaume des Tubo, ou royaume du Yarlung (617-838). Le clan des Tubo, originaire du centre du Tibet actuel, a soumis les autres populations du Haut plateau.
Ce royaume se désintègre en 838, suite à l’assassinat du dernier roi, puis à cause des insurrections d’esclaves qui ont démarrées du « couloir du Gansu » et se sont étendues jusqu'à Lhassa, à la fin du 9ème siècle. Dans les siècles qui suivirent, ce « Grand Tibet » ne sera plus jamais politiquement reconstitué. Le bouddhisme, déjà présent au Tibet sous les Tubo, est persécuté à partir de 838. Les moines se réfugient vers les extrémités du Haut plateau (Nord, Ouest et Est). De ce fait, le bouddhisme tibétain s’installe en dehors des frontières du Tibet actuel et constitue ce que le 14ème dalaï-lama nomme actuellement le « Grand Tibet » indépendant.
L’ensemble de ce territoire immense (cinq fois la France) se trouve alors dirigé par de multiples clans rivaux, disposant chacun de leur propre armée. Du point de vue social, une lente transition se met en place : le statut d’ « esclave » est remplacé par celui de « serf ». En effet, certaines familles paysannes se sont enrichies et emploient d’autres paysans pour les faire travailler sur un ensemble de terres appartenant aux seigneurs qui, eux, deviennent « rentiers ».
Sous l’influence de gourous tantriques qui ont fui l’Inde (le bouddhisme y est persécuté par les musulmans et les hindous et, finalement, s’éteindra en Inde), le bouddhisme reprend de vigueur au Tibet et atteint sa forme définitive aux 10-11èmes siècles. De grands monastères tantriques se lient aux seigneurs locaux. Ces monastères possèdent de nombreuses terres et de nombreux serfs.
Au 13ème siècle, tout le territoire actuel du Tibet est annexé par l’Empire chinois qui, à cette époque, est dirigé par la dynastie mongole des Yuan. Les monastères tibétains ont accepté la soumission aux Mongols pour éviter le massacre. Les Mongols confient l’administration tibétaine (dans un Tibet aux dimensions de la province actuelle) majoritairement à des membres du clergé de l’école Sakya.
La dynastie chinoise des Ming (14-17ème siècle) redistribue les postes pour administrer le Tibet à des représentants de différentes écoles du clergé, entre autres, la toute nouvelle école des « Bonnets Jaunes », les Gelugpa. Le fondateur de l'école Gelug, Tsongkapa (1357-1419), a deux disciples principaux qui, chacun, ont en charge la responsabilité d'un monastère important. Ces deux disciples de Tsongkapa vont devenir les initiateurs des deux lignées des célèbres réincarnations : les dalaï-lamas, d'une part, et les panchen-lamas, d'autre part.
C’est en 1642 que le 5ème dalaï-lama prendra le pouvoir politique sur un territoire correspondant au Tibet actuel (et non au « Grand Tibet »), avec l’aide d’une armée mongole (les Qoshot), et en rivalité avec une autre école bouddhique (les karma-kagyu). Les Karma-kagyupa sont soutenus par les clans Phagmodrupa et Tsangpa, à leur tour aidés par une autre armée mongole (les Chogtu), rivale de la première. En 1652, lors de la visite du 5ème dalaï-lama à la cour impériale de Pékin, la nouvelle dynastie chinoise des Qing (1644-1911) confirme son pouvoir sur le Tibet.
Suite au décès du 5ème dalaï-lama, le Tibet traverse une période difficile. Plusieurs dalaï-lamas sont assassinés avant l’âge de la majorité, des guerres sont déclarées entre différentes régions et le Tibet est envahi par des armées népalaises et turco-mongoles. A plusieurs reprises, les empereurs Qing envoient leur armée pour rétablir la paix. En même temps, ils renforcent la législation et l’administration de la région. Les frontières sont définies plus clairement et le Tibet (sous sa forme actuelle) devient une « province » de Chine.
En 1904, l’armée anglaise envahit le Tibet et le force à suivre les règles britanniques en ce qui concerne le commerce, l’aide militaire et le choix des conseillers politiques, mais, officiellement, le Tibet fait encore partie de la Chine. Le 13ème dalaï-lama accepte la tutelle anglaise et profite de la chute de la dynastie chinoise des Qing (en 1911, début de la République) pour éradiquer toute présence Han sur le territoire tibétain. L'armée chinoise est expulsée. Cette situation perdurera jusqu’à la mort du 13ème dalaï-lama, en 1933. Puis, en phase avec la crise occidentale, l’influence anglaise diminue. La Chine républicaine renoue quelques liens avec le Tibet, mais elle-même est bientôt envahie par les Japonais et se trouve affaiblie.
Après la guerre et la victoire de la Révolution Chinoise, la Chine communiste envoie son armée au Tibet afin de redéfinir les frontières de la Chine. La Chine accepte de laisser le système féodal de servage en place et de ne pas toucher aux biens des monastères. Ceci vaut pour le Tibet (province actuelle), aussi longtemps que le clergé et les nobles ne désirent pas lancer de réforme sociale. La convention est respectée pour le Tibet, mais, dans les régions limitrophes où vivent aussi des Tibétains (avec leurs monastères), mêlés à d’autres populations, l’état chinois lance la « réforme agraire », comme partout ailleurs en Chine. Il y confisque les terres des grands propriétaires pour les distribuer aux paysans, e.a. celles des monastères, d'où la révolte de 1956 dans la zone tibétaine de la province du Sichuan, révolte qui va s’étendre jusqu'au cœur du Tibet. Dès ses début, la révolte sera soutenue par les USA qui la considère comme un élément de la « la guerre froide ».
En conséquence, le 14ème dalaï-lama s’exilera en 1959, suite à une proposition que lui avait faite les USA dès 1950, et répétée à plusieurs reprises. Beaucoup de nobles et de hauts lamas sont aussi partis en exil (70.000 au total). La population tibétaine à cette époque était de 2 millions de personnes dont la moitié vivait au Tibet même,et l'autre moitié dans les provinces limitrophes du Gansu, Qinghai, Sichuan et Yunnan. (Population de Lhassa à la même époque : 25.000 personnes).