Imprimer

Les mandchous étaient-ils favorables aux lamas ?

par Jean-Paul Desimpelaere, le 22 février 2010

Vers la fin de l’ère mandchoue (ou dynastie des Qing), au début du 20ème siècle, la plupart des grands monastères du Sichuan et du Tibet occidental furent détruits par les Mandchous.

 

Pourtant les groupes de soutien à la cause tibétaine parlent invariablement des Mandchous comme d'une dynastie anti-chinoise. Selon les défenseurs du dalaï-lama et d'un Tibet indépendant, la dynastie mandchoue, de chœur avec celle des Mongols, fit preuve de beaucoup de respect pour le lamaïsme. Tant les Mandchous que les Mongols auraient été spirituellement subordonnée au lamaïsme. De cette manière, les groupes de soutien à la cause tibétaine renforcent encore notre perception selon laquelle le Tibet n’aurait été annexé à la Chine qu’en 1951... par des athées …. et communistes, de surcroît !

 

Pourtant ce sont bien les Mandchous qui ont commencé à limiter le pouvoir politique du lamaïsme au Tibet et dans les régions avoisinantes. Le souffle nouveau de la pensée républicaine leur parvenait déjà. Dans une tentative de modernisation généralisée qui s'étendait à toute la Chine, les Mandchous furent confrontés aux seigneurs féodaux tibétains et, surtout, à l’élite cléricale du bouddhisme tibétain.

 

Au Sichuan, c'est le général Zhao Erfang qui s’attaqua sérieusement à la féodalité tibétaine. Il força les monastères à libérer une partie des moines de leurs charges cléricales, il imposa un quota maximal de moines par monastère, il mit un terme au noviciat, il supprima les taxes que les paysans devaient payer aux monastères et il les remplaça par une donation. Évidemment, certains monastères se rebellèrent, mais ceux-ci furent pris manu militari et complètement détruits. C’est ce qui advint des grands monastères des Batang, de Qamdo, de Litang, de Deqen et de Drayab, tous détruits entre 1905 et 1912. La décennie qui suivit ne fut pas florissante, toute les régions tibétaines étaient soumises aux rivalités entre les chefs de guerre. Les reconstructions n'étaient pas à l'ordre du jour.

 

Dès lors, prétendre aujourd’hui, comme le font les défenseurs d'un Tibet indépendant, que ces monastères furent rasés pendant la Révolution Culturelle, c’est comme si on comptait les victimes de la première guerre mondiale parmi celles de la seconde.

 

Note : source de : Wissing, Shelton, « Pionnier au Tibet. »

monastère de Litang au Sichuan en 2007 (photoJPDes.)
monastère de Litang au Sichuan en 2007 (photoJPDes.)